Face Everything And Rise

  « Salut ! S'exclame doucement une voix derrière moi. »


Je me retourne, intimidé. Mon regard croise une paire d'yeux couleur chocolat. Même sans eux, je savais qui venait de me parler. Les filles de la table 7. Je rougis pendant que par réflexe je commence à triturer mes doigts. Je les tords dans tous les sens, espérant que cela fera passer le trac qui s'installe dans mon ventre, prenant de plus en plus de place.


Celle qui me semble être la plus jeune, la blonde, me sourit en se doutant de mon inquiétude.


« On est désolée de te déranger, mais dès que nous sommes entrées, nous t'avons tout de suite remarqué. M'explique-t-elle. »


Je passe nerveusement ma main dans mes cheveux. Comment ne pas me repérer même dans ce bar ? Ils sont teints en bleus. Pas d'un bleu électrique, non, plutôt d'un bleu pâle. Mais comme ma dernière coloration remonte à un peu plus d'un mois, quelques mèches grises commencent à s'installer, ce qui n'est pas pour me déplaire. Je ne peux m'empêcher de rougir violemment en remarquant la façon dont les deux adolescentes de mon âge m'observent.


Calum avait raison ; elles ne cessent de me faire les yeux doux.


« Oh, non, ne te méprends pas, ce n'est pas à cause de tes cheveux ! 


- Mon amie est moi nous avons seulement trouvé que tu étais vraiment mignon avec ton côté enfantin. Rajoute la blondinette. 


- En réalité depuis que nous sommes entrées nous n'avons pas arrêté de te regarder. Et on se demandait si l'on allait enfin t'aborder. On te trouve vraiment très beau. Vu comme tu es, je suis certaine que beaucoup de filles viennent te demander ton numéro, mais je voudrais vraiment qu'on...


- Garance, tais-toi, tu le gênes ! Intervient son amie. »


En effet, alors que la brune commençait à partir dans un monologue, j'ai commencé à sentir que mon cœur s'accélérait. Cette fille a clairement dit qu'elles l'observaient depuis le début. Certes, j'avais bien des doutes, mais l'entendre le dire me fait l'effet d'une bombe qui explose dans mon cerveau. Des centaines d'informations se mettent à circuler, me donnant mal au crâne en quelques secondes.


Je sens malgré moi mon visage pâlir. "Je suis certaine que beaucoup de filles viennent de te demander ton numéro". Je déglutis difficilement. C'est bien loin d'être le cas. La plupart du temps, les gens ne prêtent pas forcément attention à moi, et quand ils le font, c'est souvent pour cracher sur moi. Ici, un peu plus qu'à l'extérieur, je me sens visible mais je reste quand même un simple serveur. Alors non, personne ne m'a jamais demandé mon numéro. Car personne ne s'est jamais intéressé à moi.


« Bon, avant de te mettre plus mal à l'aise que tu ne l'es déjà, je me présente, Fanny. Et voici ma meilleure amie, Garance. »


Je ne réponds que par un simple mouvement de la tête, encore sous le choc. Je suis bien trop timide pour qu'on me dise me trouver beau sans prendre des pincettes. Je fronce légèrement mes sourcils, conscient que j'oublie quelque chose. Quelque chose d'important. 


« Et toi, tu t'appelles comment ? »


Voilà ! À force de me concentrer sur les paroles de la brune, j'en ai totalement mis de côté mes bonnes manières. Je relève légèrement ma tête que j'avais baissée, croisant le regard des deux filles par la même occasion.


« Je... Michael... 


- Je suis vraiment désolée de te demander ça d'une façon aussi malpolie, mais est-ce que tu accepterais de nous donner ton numéro ? Revient à la charge la brune. »


Tout mon corps hurle une réponse négative. Je me retiens de partir en courant tellement cette situation me gêne. J'aimerais lui expliquer que je n'ai clairement pas envie, mais ma timidité m'en empêche. Et j'aurais peur de passer pour un sauvage alors qu'elles ne sont pas méchantes avec moi. Décidément, je ne peux pas leur dire que je refuse. Même si j'ai envie de le faire.  


Au bout de quelques secondes, je trouve finalement un plan pour m'échapper de cette situation gênante.


« Euh.. Oui.. Mais je suis en service.. Donc.. Il va falloir que vous attendiez. 


- Oh, évidemment ! Tu termines quand ?


- D.. Dans deux heures.. Mentais-je. 


- Nous pouvons attendre. »


Sans attendre plus longtemps, je m'excuse maladroitement avant de me précipiter derrière le comptoir, les joues brûlantes et les mains moites. Calum m'accueille en héros, levant ses deux pouces en l'air, un sourire sur le visage.


« Alors ?


- Horrible. 


- Tu avais l'air de bien gérer pourtant, qu'est-ce qui s'est passé ? 


- Elles.. Elles m'ont demandé mon numéro..


- Allez, qui avait raison ? Elles te dévoraient du regard depuis leur début, j'en était sûr. Bon, et du coup, quand vas-tu les revoir ?


- Jamais. 


- Mais... 


- Non, il est hors de question que je donne mon numéro à des inconnues. Je t'avais dit que c'était une mauvaise idée que j'y aille. Pourquoi n'as-tu pas pris ma place ? Le coupais-je d'une voix hargneuse.


- C'était toi qu'elles regardaient, pas moi. Et puis je pensais que ça te ferait du bien de t'ouvrir un peu..


- Tu n'as pas à décider de ce qui est bon ou pas pour moi. Nous ne sommes que des collègues !


- Je n'ai rien décidé du tout ! Et puis je suis désolé de te l'annoncer, mais à un moment tu devras bien faire face à tout et t'élever !


- Laisse tomber, Calum. J'ai terminé mon service pour ce soir. Je vais sortir par l'arrière du bar pour qu'elles ne reviennent pas à la charge. »


 Sans un mot, j'ignore le regard désespéré de mon collègue et pars dans une pièce réservée au personnel. 

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