Chapitre 4 : Découverte des lieux







      Leur marche silencieuse n'était pas pesante, mais elle dégageait quelque chose de dérangeant. Il aurait été difficile de dire pourquoi, mais la faute incombait surement aux habits des concernés et à la saleté présente sur l'un d'eux. Surement.


      Pendant leur marche, Mozart jeta de nombreux coups d'œil à son guide, pour s'habituer à sa nouvelle apparence.


      Il possédait des cheveux noirs qui n'étaient pas cachés par les habituelles perruques de la cour, assez longs pour cacher en partie ses yeux noirs, perdus dans le vague. Un léger trait noir en faisait le tour, discret. Il abordait à présent une courte barbe soignée, bien loin des joues rasées qu'il lui avait toujours vu. Il avait cependant encore son nez droit et en dessous se dessinait des lèvres fines. Il était également plus pale que dans ses souvenirs, mais la dernière fois qu'il l'avait vu, c'était lui le plus pale des deux. Ses traits étaient plus fermes, ses joues moins creuses : il semblait avoir rajeuni d'une quinzaine d'années environ.


      En quelques mots : plus jeune et plus sombre.


      Sa stature droite montrait une taille plus grande, cachée par des vêtements pour la plupart scintillants. En dehors d'une chemise blanche, tous ses habits étaient noirs. Tous. De ses chaussures cirées à la broche en forme de rose qui maintenait le col de sa chemise en passant par son pantalon et sa veste légèrement pailletée.


      C'était surprenant pour le plus jeune compositeur de voir son ami ainsi, mais en sachant que lui-même était à présent bien différent, il ne chercha pas à se comparer à ce nouveau Salieri. Ses regards curieux cessèrent.


     Aucun d'eux ne démarra de conversation, incertains sur quoi dire. Chacun était à ses pensées, et cela dura jusqu'à ce qu'enfin Salieri s'arrête devant une porte que Mozart avait déjà eu l'occasion de franchir, mais sous d'autres circonstances.


      En entrant dans le salon, son regard se posa en premier sur les trois fauteuils et la table basse, bien visibles dans le coin de la pièce, puisque illuminés par les rayons d'un soleil malade qui ne leur rendait pas honneur. Les revoir face à lui (puisqu'aucun meuble ne se trouvait entre le compositeur et l'objet actuel de ses pensées) lui rappela des évènements du passé. D'avant. Lorsqu'il était encore apprécié à la cour, avec son corps à lui et sa femme qui l'aimait.


      Constance.


      Il fit taire la douleur qui transperça violemment son cœur, et préféra se concentrer un moment sur ces évènements passés. Il était déjà venu ici ; une fois pour demander un prêt auprès de l'autre compositeur. Ensuite il était venu requérir son aide après que Rosenberg ait enlevé le ballet des Noces de Figaro. Et finalement il était revenu après la première représentation de ses Noces, pour se plaindre après avoir appris que son opéra ne serait produit que huit fois.


      Ce n'était pas un lieu familier, mais après les ordres de l'empereur, il ne pouvait pas retourner dans son appartement. Il était d'ailleurs probable qu'il est été vendu à quelqu'un d'autre après son... décès.


      Mais il ressortit de ses pensées, en voyant Salieri se retourner vers lui. Un certain malaise se faisait sentir, alors que chacun mémorisait l'apparence nouvelle de l'autre, mais aucun ne l'aurais jamais avoué.


      - Puisque vous resterez ici avec moi pendant un moment indéterminé Mozart, commença le rival du susnommé en évitant de montrer son début d'agacement rien qu'à l'idée de cohabiter avec son rival, il serait plus judicieux que vous sachiez à quoi ressemble l'ensemble de votre nouvel habitat.


      Sur cette entrée en matière, il se dirigea vers une porte située dans le coin gauche, au fond de la salle, dont Mozart se doutait déjà de la fonction. À une occasion, il avait discuté avec Salieri dans le salon, lorsque la Cavalieri avait surgi dans la pièce pour sa leçon de chant. Si elle avait adressé un sourire charmant à son professeur, elle l'avait foudroyé du regard avant de se diriger vers la pièce où Salieri l'avait conduite et où il le conduisait à son tour.


      Effectivement, le grand piano au centre de la salle permettait à tous ceux qui le voyait de deviner la fonction de cette salle. Mais là où la pièce précédente était lumineuse, avec ses rideaux écarlates, son lustre en cristal suspendu au plafond, et toutes ses dorures, celle-ci se révélait plus simple, un peu plus intime. S'il y avait un lustre similaire à celui du salon qui le fit sourire, l'énorme poutre blanc nacré dans un coin de la pièce l'étonnait, au vu de son manque d'utilité.


      - Il est évident que lorsque je reçois un élève pour sa leçon, je vous prierai de ne pas nous déranger, formula Salieri sur le ton de l'évidence, sans plus s'attarder dans la salle et en marchant toujours en ligne droite.


      Le prodige le suivit, curieux d'en découvrir un peu plus sur ce qui serait son lieu de vie pendant un long moment. Pourtant, il fut vaguement déçu lorsque son acolyte ouvrit la porte, révélant une chambre très simple, au vu de sa présence dans le palais impérial et des deux autres pièces qu'il avait vu avant. En dehors du lit, d'une armoire et d'une petite table appuyée contre le mur, près de la porte qui permettait l'accès à la pièce, la présence d'une croix en bois et en ivoire cloué au-dessus de cette même table donnait au lieu une atmosphère plus religieuse qu'intime.


      Il manqua le regard un peu dégoûté et irrité devant la crasse qui tombait de temps à autre sur le sol de ses appartements. Mais en voyant que le jeune homme sale ne faisait pas attention à lui, il se ressaisit, et ne laissa pas transparaître plus qu'un masque courtois.


      - Ma chambre, déclara Salieri. À moins que vous ayez besoin de quelque chose ou une demande, que tous les domestiques ne soient absents et que je me trouve ici, je vous prierais de ne pas y entrer. Il reste encore trois pièces à visiter, termina-t-il avec un sourire poli.


      Ils retournèrent dans le salon, et Salieri désigna une porte auquel Mozart n'avait jamais prêté attention jusque-là. Il fut surpris d'y trouver une cuisine, où tous les meubles semblaient être faits du même bois et offraient à la pièce une couleur chaude. Le jeune homme était curieux de connaitre l'arbre qui permettait de donner cet aspect si peu commun dans un palais, qui sont souvent plus dorés que chaleureux. Mais il s'en détourna bien vite, soudainement rattrapé par son ventre qui lui rappelait qu'il n'avait pas mangé depuis... un mois.


      - Mozart, vous sentez-vous bien ?


      La question de Salieri le détourna aussitôt de la faim qui commençait à le tirailler. Il eut un sourire embarrassé, mais répondit tout de même, une main inconsciemment posée sur son ventre :


      - Oui, merci Salieri, je me sens un peu fatigué, c'est tout.


      Il dut avoir l'air convaincant, car malgré le sourcil droit qui se haussa d'un air un peu surpris, l'autre compositeur acquiesça, et expliqua les horaires habituels pour les repas. Le blond s'étonna de la régularité de son compère, lui qui prenait ses déjeuners et ses diners à des heures improbables, mais face à l'esprit très carré de l'homme, son étonnement fut de courte durée.


      - Bien sûr, nous ne mangerons pas tout de suite, il n'est que 11h, le déjeuner sera prêt dans une heure environ, lui précisa le brun. Mais si vous avez faim bien avant un repas, sachez qu'il y a toujours de quoi faire patienter ici. Il reste encore deux pièces Mozart.


      Effectivement, deux portes étaient jointes à la cuisine. L'habitant du lieu ouvrit celle de gauche, plus claire que sa voisine, et d'un aspect plus élaboré, et son cadet entra alors dans la pièce.


      Il fut déconcerté de voir ce qui s'apparentait à une chambre, mais plus riche en décorations que la première. Il y avait quelques petits tableaux de musiciens accrochés au mur, et Mozart fut surpris d'en reconnaitre certains. Un chandelier haut et éteint était adossé à droit d'un petit bureau finement sculpté dans ce qui paraissait être du chêne. Le lit était assez large pour contenir deux personnes sans qu'elles ne soient nécessairement collées, bien que le blond n'en compris guère la raison, et possédait des baldaquins clairs, à l'inverse de ceux du lit de Salieri. Le siège près du bureau était aussi précieux que ceux du salon.


      - Herr Mozart, voici la pièce où vous dormirez à présent, j'espère que cela vous conviendra, en évitant de regarder les tableaux sur le mur.


      - C'est parfait, merci mon ami, assura le plus jeune en gardant ses questions pour plus tard. Vous avez dit qu'il restait une pièce à visiter.


      - Oui, il s'agit de la salle de bain ; je vais demander qu'on vous fasse. Ainsi, vous pourrez vous observer à votre aise, et cela devrait vous faire le plus grand bien pour vous... remettre de votre retour.


      Mozart acquiesça, appréciant la bonté de son ami, et désireux de se laver un bon coup. Salieri lui tourna le dos et s'apprêtait à sortir de la salle, quand son compère l'arrêta en attrapant son bras :


      - Pour l'empereur, pensez-vous que...


      - Nous en reparlerons plus tard, Mozart, je suis encore un peu fatigué et ce doit aussi être votre cas, l'interrompit le brun pressé de fuir son cadet.


     Il capta le regard anxieux de son rival et le savoura intérieurement. Malgré les changements survenus dans la nuit, il lui fallut reconnaitre qu'il était encore celui qui tirait sur les ficelles qui permettaient à son rival de bouger. La peur était un allié très puissant qu'il avait déjà eu à utiliser contre lui ; pour le requiem inachevé.


      Peu importait la raison pour laquelle Mozart semblait craintif, cela pouvait jouer en son avantage. Il n'avait pas son talent divin, mais il avait toujours possédé plus de pouvoir à la cour que Mozart n'en avait jamais eu. Salieri aurait laissé s'échapper un sourire victorieux s'il n'avait pas été en face de son ennemi.


      La poigne sur son bras se détendit et il put s'éloigner du blond et le laisser seul. La porte vers le salon se referma dans un silence soudain pesant.


      La solitude écrasa les épaules du jeune homme avec la dureté d'une enclume, et un frisson glacé le parcourut, dans un sentiment de panique identique à celui ressentit dans le cimetière. S'il était parti dès qu'il avait entendu les fossoyeurs, et qu'il était entouré de personnes, même de simples passants, le retour brutal de cette sensation fit accélérer sa respiration. Il n'y avait plus personne, plus de regards, plus de présence vivante autre que lui.


      Il était seul.


      La porte de la cuisine s'ouvrit soudainement.


      La sensation glacée disparut en même temps, mais le génie jeta un regard interloqué à la personne qui se tenait à présent devant lui.


      Une petite femme, blonde comme les blés, avec de beaux yeux verts le regardait fixement. Sa tenue simplette indiquait son statut : servante. Le seau plein d'eau dans ses mains fit comprendre au blond la raison de sa présence ici, mais au vu de la surprise authentique affichée sur le visage juvénile, elle ne s'attendait pas à trouver le musicien dans la pièce.


      - Maitre Salieri m'a envoyé vous préparer un bain, mais... je m'attendais à ce que vous patientiez dans votre chambre, avoua-t-elle en faisant une courbette gracieuse.


      - Je ne m'attendais pas à croiser quelqu'un si tôt, lui répondit franchement l'homme avec un sourire un peu charmeur. Quel est votre nom ?


      - Je m'appelle Sofia, messire.


      Bien qu'elle n'ait pas eu beaucoup d'expériences dans l'art de servir, elle avait déjà entendu ses ainés raconter les impolitesses courantes des nobles envers eux. Il arrivait une fois sur deux que la personne ne prenne pas la peine de demander le nom de leur domestique, mais celui-ci faisait parti de ces gens qui accordaient un peu d'intérêt à ceux qui les servait. Maitre Salieri aussi après tout, mais il recevait peu d'invités pour qui le faisaient aussi. En réalité, les invités ne croisaient presque jamais les domestiques. Mais Sofia prit note de parier avec la cuisinière principale du palais que le lendemain, l'homme aurait oublié son nom.


      Mais il lui avait suffit d'un regard pour comprendre que le blond était impoli envers d'une façon somme toute inattendue ; il n'avait apparemment pas pris conscience que la saleté étonnante qui le recouvrait se répandait, lentement mais surement, sur le sol. Mais cela ne l'empêchait pas de remarquer encore plus d'étrangetés sous la couche de crasse. La blonde n'était pas encore aveugle. À présent, elle comprenait mieux l'ordre de son maitre, mais elle aurait besoin de quelques seaux de plus, ainsi que des serviettes. Au moins pour le sol.


      - Je me dépêche de préparer votre bain messire... ?


      Mozart fixa la femme, complètement pétrifié par la lueur dans les yeux verts de cette femme, qui lui en rappelait une autre. Il se sentit blêmir, mais cela passa inaperçu sous la chaux qui maculait encore son visage.


      - Vous ne pourriez pas me croire, pas si je vous le disais, affirma-t-il.


      Il ne pouvait pas se permettre de prendre le risque d'éventer le secret, il se sentait à peine capable de ne pas s'effondrer à la pensée qu'il était mort et de nouveau vivant. Ce genre de miracle était déjà arrivé au fils du Seigneur, mais il était loin d'être un modèle de vertu comme lui. De plus l'empereur n'aimerait pas qu'on lui désobéisse ainsi. La vérité ne pouvait pas être adaptée dans le cas présent.


      - Je regrette messire, mais il serait inapproprié que je ne sache pas comment vous nommer, insista la domestique.


      - ... Très bien. Mais sachez avant cela, prévint-il en voyant le regard victorieux dans les yeux verts, que l'empereur m'a interdit de dire mon nom. C'est un secret important, et qui pourrais vous attirer des ennuis, alors êtes-vous sûre de vouloir le connaitre ?


      La femme acquiesça, bien qu'un peu effrayé à l'idée qu'il s'agisse de quelque chose de très grave. Qui dans le monde ne pouvait pas dire son nom à une simple domestique ? S'il était une personne si importante, alors pourquoi l'envoyer dans les appartements de son maitre Salieri, compositeur de la cour, certes, mais moins aimé par l'empereur que Cimarosa ? Et qui se présenterait au palais impérial, sale comme un vulgaire mendiant ?


      Mozart se demander si ce qu'il s'apprêtait à faire engendrerait des conséquences fâcheuses par la suite, mais il n'était pas homme à garder des secrets, encore moins son nom. S'il ne pouvait pas le révéler à la domestique, alors il ne parlerait plus qu'aux nobles qui étaient avec l'empereur dans le salon où il était tombé. Ne portant guère ces hautes gens dans son cœur, il se résolut, se redressa un peu et révéla avec un sérieux digne de celui qu'il montrait lorsqu'il dirigeait ses orchestres lors des représentations :


      - Je suis Wolfgang Amadeus Mozart.


      De l'eau se répandit sur le sol, sur le parquet qui devenait humide, mais il s'inquiéta davantage de l'effroi soudain sur le visage de la domestique. Tout à son effarement, elle n'avait même pas remarqué qu'elle avait lâché le seau plein qui était auparavant dans ses mains.


      - Mais.... vous.... et votre visage...


      - Ne paniquez pas !


      - ... comment ? réussit à prononcer Sofia avec un regard méfiant.


      - Je ne sais pas, personne ne sait. Je me suis réveillé il y a à peine quelques heures dans le cimetière qui borde la ville. J'avais déjà ce visage et ce corps à ce moment. Je me suis rendu devant l'empereur et grâce à Salieri, j'ai pu convaincre l'empereur de qui j'étais. Seuls ceux qui étaient avec l'empereur savent aussi la vérité. Herr Salieri aussi a changé, vous ne l'aviez pas remarqué ?


      - N-non. Il était de dos quand il s'est adressé à moi, mais je reconnais avoir vu un changement vestimentaire, mais je ne me suis pas attardé plus que de nécessaire.


      - Je comprend que ça soit déroutant, mais ni moi ni Salieri ne devons nous montrer devant d'autres personnes. Je pense qu'il est judicieux de ne pas utiliser nos noms devant qui que ce soit. Je vous fais confiance.


      Ce n'était pas tout à fait vrai, mais ce n'était pas trop loin de la vérité. Il avait bien une pensée derrière la tête, mais il la gardait pour plus tard.


      - Messire Mozart, je ne le répèterais cela à personne, vous avez ma parole. En attendant que votre bain soit prêt, vous pourriez vous asseoir, proposa-t-elle en indiquant une des chaises près de la table.


       Sofia se résolut à faire une croix sur son pari. Elle devrait être astucieuse, pour ne pas révéler la présence d'un invité qui resterait probablement longtemps chez son maitre.


      Il la remercia et s'assit. Il observa la jeune femme encore assez pâle aller et venir avec son seau d'eau, se sentant plus affamé et plus épuisé à chaque minute qui passait. Mais il évita soigneusement de croiser les yeux verts troublés. Il y décelait une étincelle qui lui serrait le cœur, alors il fuyait ses yeux.


      - Messire, votre bain est prêt.


      Le blond lui sourit, avant de la laisser. Il entra finalement dans la seule salle qu'il n'avait pas encore vu ; la salle de bain.


      Il devait admettre qu'il ne s'attendait pas à une telle vue. La baignoire était très large, le lavabo en étain et le tabouret en acajou étaient du plus bel effet. Pourtant, ce qui rendait la pièce si exceptionnelle, c'était son miroir.


      Mozart avait toujours vu des miroirs dans la salle de bain, mais celui-ci les dépassait tous. Il s'étendait sur le plus petit des murs de la salle, mais recouvrait totalement le pan de ce mur. Il faisait donc environ trois mètres de large et deux mètres de haut environ. Mozart n'aurait jamais cru qu'un tel luxe serait accordé au compositeur de la cour, surtout depuis l'arrivée de Cimarosa. Mais le palais datait de bien avant Joseph II, cela était donc possible, mais ne datait surement de la construction du palais.


      Mais, bien que cette vision lui soit exceptionnelle, son reflet le saisit davantage. Il était sale, mais pas assez pour qu'il me soit impossible de discerner mes changements physiques et vestimentaires. Il était encore naturellement blond, si le bout de ses mèches de cheveux ne mentait pas. Contrairement à ce qu'avez prétendu le fossoyeur au cimetière, il était encore un garçon, à son soulagement, et était plutôt agréable à voir, bien que cela soit d'une façon assez différente de ce qui était considéré comme « beau » dans ce pays. Il était assez difficile de l'expliquer.


      Son visage était un peu plus anguleux, les cernes qui avaient auparavant très foncées avaient presque disparues, sous ses nouveaux yeux noisettes. Il était aussi un peu plus grand qu'avant, mais cela pouvait être une impression due au fait qu'il était un peu plus... androgyne. En tout cas, il était un peu moins potelé qu'avant. Il avait visiblement perdu entre dix et quinze ans environ. Quant à ces vêtements, il ne savait pas vraiment quoi en penser. Autant, il voyait les couleurs très originales qui ne le dérangeaient, mais les mélanges roses, noirs et argentés ne lui plaisaient pas pour autant. Quand aux paillettes, il considérait cela plus comme une décoration assez inutile.


      Il arrêta son observation après avoir noté un maquillage surprenant autour des yeux, plus doré et extravagant que le coup de crayon noir autour des yeux de Salieri. Il se déshabilla finalement, et se sentit assez mal à l'aise face au contraste qu'il affichait entre le sourire taquin qu'il faisait, comme s'il cherchait à charmer son propre reflet dans le miroir, et les ombres dans ses yeux. Il sentit un début de nausée en voyant ce qui s'apparentait à des bleus sur son nouveau corps. Ils étaient récents, de quelques heures à peine et étaient peu nombreux ; ils devaient provenir de son petit séjour dans la fosse commune, mais l'un d'eux avait une couleur jaunâtre dérangeante au niveau de sa côte gauche mais assez éloigné de l'emplacement de son cœur, et devait dater d'au moins deux jours. Il prit note que si un petit séjour chez les morts lui donnait si facilement des bleus, c'est que sa peau devait être plus fragile qu'avant.


      Il s'engouffra avec plaisir dans l'eau chaude, et se promit de remercier Sofia et Salieri. Pendant un moment, seul un cocon de bien-être l'enveloppa, mais cela ne dura pas, alors qu'il devenait mélancolique.


      La douleur le frappa en plein cœur, et s'il avait été debout, il se serait effondré sur le parquet. Une étincelle voletait dans son esprit et faisait flamber son être.


      Constance.


      De toutes les choses qui pouvaient lui manquer, sa femme était en tête de liste, sans laisser place à une quelconque concurrence. Il avait à peine eu le temps de faire son deuil lorsqu'elle est partie peu avant lui. Sa dernière pensée avait été pour elle.


      J'aurais aimé que tu sois là avec moi.


      Mozart se savait égoïste d'avoir pensé ainsi, en sachant que le vide causé par son absence aurait inévitablement brisé son aimée, mais il ne croyait plus avoir réussi à le faire. Pas quand il était revenu au domaine des vivants et que le domaine des morts avait gardé son épouse.


      De petits cristaux tombèrent dans l'eau qui se fonçait au fur et à mesure que la crasse s'enlevait du corps du génie. Il le remarqua à peine, alors que les cristaux transparents devenaient brunâtres en se mêlant à la poussière d'une colline.


      Les épines qui meurtrissaient son cœur se firent moins brulantes, mais la solitude figea son esprit.


      Il n'avait plus personne à qui s'adresser, se confier, sur qui s'accrocher. Il n'était plus qu'un intrus indésirable, qui avait perturbé un peu plus la vie des nobles.


      Pourtant, la chaleur de l'eau apaisa le blizzard qui tourbillonnait en lui.


      Le blond ferma les yeux et passa la tête sous l'eau. Un silence étrange lui parvenait, comme assourdi. Tous les hommes peuvent trouver l'inspiration en vivant une action banale. Pour Mozart, l'eau chaude lui murmura une idée.


      Le génie était de retour.


      La pensée de Constance le ramena à leurs plus beaux instants. Il ne voyait plus sa figure pale et épuisée qui avait hanté son esprit quand elle était morte, il ne voyait plus que sa douceur, sa candeur et l'amour qu'elle lui avait porté.


      Mozart aimait parler d'amour en musique, et il était de nouveau inspiré. Un amour endeuillé, dramatique, mais tendre.


      Il vivrait pour elle. Pour terminer les souhaits qu'elle avait eu et montrer tout l'amour qu'il possédait encore pour la femme de sa vie.


      Un sourire amoureux et victorieux étira ses lèvres.


      Il était le fou qui se lève.




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Chapitre fini ! ça faisait déjà un long moment depuis que j'ai commencé à l'écrire,  mais à chaque fois, je me sens obligée de modifier encore des détails. Au moins, il est arrivé assez tôt pour la nouvelle année, donc on peut y voir une bonne résolution : moins de procrastination. On ne peut pas en dire autant pour les devoirs, je suis dans un entre-deux.


Je ne suis pas prise du tout dans l'esprit des vacances de Noël et en même temps, j'ai bien perdu l'habitude de réviser au moins un peu chaque jour. Je vais d'ailleurs continuer des devoirs après avoir posté ce chapitre.


J-3 avant le retour en cours (oui je suis une sadique)


Mais j'espère que votre réveillon s'est bien passé pour tous, et qu'il n'y a pas eu de déceptions pour les cadeaux de Noël.


On approche dans la pire phase de l'année ; l'après-Noël. Si je pouvais encore glander en seconde, je prierais mes lectures de me donner des coups de pied pour m'apprendre à arrêter de procrastiner, puisque le bac blanc de français sera avant les vacances de février, et qu'il faudra rendre le TPE fait en groupe avant les vacances, sachant qu'au retour, on aura droit aux oraux du TPE (pas direct, mais ça viendra très vite.   :/  )


Mais ne déprimons pas sur les cours, revenons au chapitre.


Vous trouvez que je décris trop les lieux ? Bah tant pis. J'ai épluché le film Amadeus pour savoir comment était organisé le lieu, et qu'elle objet était à quelle place, ainsi que leur couloir. J'en ai fait un schéma très laid que je vous montrerai peut-être un jour. Après y avoir passé autant de temps que pour ma dernière rédaction d'invention en français (qui a fini par faire dix pages), je considère que ne pas décrire plus est presque une trahison personnelle, mais comme les trois dernières pièces ont été totalement inventées, et que je n'avais pas d'idée précise, ça aurait fait un changement un peu brutal. Donc il y aura plus de descriptions de lieux les fois suivantes, parce que c'était un travail volontaire assez long et que je ne le jetterais pas à la poubelle.


Au moins, je ne suis pas Victor Hugo. Il est très bien, hein, mais faire quinze pages juste pour décrire les rues de Paris, ça fait beaucoup à lire. Et si j'avais sa plume, je vendrais surement des livres. Mais j'adore les fanfictions, et c'est plaisant à écrire.


Ensuite, nous avons Sofia. Dieu que je suis indécise à son sujet. J'en ai discuté brièvement avec ma sœur ce matin avant de lui dire d'un coup qu'en faite il s'agissait de mon point de vue extérieur à Mozart quand Salieri n'était pas là. En fait... c'est le cas. Je ne m'en étais même pas rendue compte, mais j'avais toujours concentré mes points de vue sur Mozart et Salieri. Mais comment je hais le "je" dans les histoires quand c'est mal fait, reporter le point de vue sur elle m'a fait assez bizarre. Je la trouve à la fois un peu ngeungeu et un peu effronté. C'est pas un mauvais truc, hein, mais de la part d'une servante... on en a pas croisé beaucoup dans Amadeus. On voit bien quelques domestiques de temps à autre, mais ils parlent à peine ou jamais.


Je pense qu'elle jouera un rôle dans la résolution d'ennuis, mais puisque mon cerveau ne propose rien, sachez que les ennuis ne commenceront pas tout de suite. Il y aura des tensions pendant un temps, mais pas d'ennuis avant que Mozart et Salieri ait passé... une semaine coincé dans l'appartement ? Selon vous, les ennuis viendront-ils de l'intérieur ou de l'extérieur ? J'aimerai voir quelques hypothèses dans des reviews, mais si vous préférez attendre, c'est compréhensible. En tout cas, on pourra tout de même compter sur sa discrétion, Sofia n'est naïve et j'espère l'avoir bien retranscrit ici, ou au moins sous-entendu.


Enfin, Constance. Ouhouhou


(*se cache loin des bombes avec un sourire sadique*)


Que j'ai décidé qu'elle mort était assez anodin de base, je pensais qu'elle gênerait et que je saurais pas quoi en faire, et sa mort était la solution facile à l'origine. Mais elle a un poids dans l'histoire.


J'ai lu la majorité (pas toutes, mais beaucoup) des fanfictions Amadeus ou Mozart l'Opéra Rock, et il est courant de voir qu'elle n'est pas très appréciée. Pour ma part, celle de la comédie musicale m'ennuie un peu, mais je n'ai rien à lui redire, alors que je plains celle d'Amadeus. Et je pense savoir d'où vient cette colère contre elle. Oui. C'est LA scène, n'est-ce-pas ?


Comment ça, quelle scène ? Celle de la version intégrale. Celle où elle vient chez Salieri à sa demande pour qu'il accorde son aide à Mozart en le faisant devenir le professeur de musique de la nièce de Joseph II auprès de Joseph II lui-même. En échange d'une faveur. Et où elle commence à se déshabiller, avant de se faire jeter à la porte (pas littéralement, mais Salieri se barre de la pièce comme un lâche alors que c'est lui qui lui avait dit qu'il s'agissait du prix à payer pour que Mozart ait ce poste). Cela voudrait-il dire que Constance Weber était une sal*pe ?


Pas selon mon interprétation. C'est plus un sacrifice morale qu'autre chose. Elle est toujours fidèle à Mozart (qui ne s'est pas trop gêné d'avoir une nuit avec la Cavalieri alors qu'il était fiancé), et elle ne cherche qu'à lui donner le meilleur, quitte à arriver à une telle extrémité.


Je reconnais que je généralise, mais il arrive assez souvent qu'elle soit à peine mentionné, ou juste pour dire que Mozart ne l'aime plus. C'est assez triste, et pas tout à fait réaliste.


Je généralise pas mal là, mais quand il s'agit d'une fanfiction Mozart/Salieri, je tiens à rappeler que le contexte historique ne se prête pas beaucoup à l'homosexualité. C'était une pratique jugée mauvaise, et l'Église, même si elle perdait du pouvoir, le rejetait aussi et le peuple suivait cette haine de l'homosexualité. Pour autant, il a bien existé des gays, des bis et des lesbiennes dans l'Histoire, mais ils se cachaient. Et dire que Mozart aimé Constance, mais qu'en fait il était gay (ou au moins bi), ça fait bizarre à lire. Je veux être proche du film, et je ne dénigrerais pas Constance pour que Mozart se tourne vers Salieri. Tout comme je ne peux pas rendre Salieri tendre avec Mozart alors qu'il le déteste. Il serait donc logique de faire comprendre qu'elle n'est ni invisible ni une cruche. On peut ne pas la mentionner, mais le fluff n'est pas un style que j'affectionne beaucoup, surtout pas alors que Salieri a tué Mozart (dans le film, pas dans la réalité)


Contrairement à mes parents, je ne pense pas que deux âmes sœurs  du même sexe ne s'apprécient que comme des amis. Je pense qu'ils peuvent s'aimer comme le ferait un couple. Mozart et Constance étaient des âmes sœurs, et Mozart et Salieri aussi, bien qu'ils ne le comprenne pas. Je tire les ficelles qui les rapproche ou les éloigne, et je ne les ferais pas passer d'un bord à l'autre pour mon plaisir personnel. Tout comme je leur donnerai des obstacles sur leur route.


De ce qu'on voit de Constance, sa mort serait un fardeau pour Mozart, et il l'aimerait toujours. Mais est-ce mal d'aimer deux personnes quand l'une est morte et l'autre est du même sexe ?


Vous avez quatre heures.


Blague à part, c'est une question assez subjective, et j'aurais du mal à prendre tous les personnages avec des pincettes, puisque mon point de vue d'ado du 21e siècles n'est pas celui qu'une ado aurait eut fin 18e siècle. Et le contexte historique de l'époque jouera un rôle important dans la fanfiction, et je n'y ait pas participé.


Vous êtes surpris ? Pour vous donner une idée, Mozart est mort le 5 décembre 1791, et est revenu disons le 7 janvier 1792. 1792. Si ça ne vous parle pas, alors quel âge avez-vous, est-ce que vous êtes sénile ou est-ce que vous oubliez une date aussi marquante que celle-là, surtout pour les français et françaises ?


(Je ne me moque pas, mais si vous n'avez pas compris mon allusion, je ne serais pas plus explicite. Pas dans ce chapitre.)


Sur ce, j'espère que le chapitre vous aura plus, j'essayerais de reposter avant les prochaines vacances cette fois, et je vous souhaite de bonnes rentrées !


(*s'enterre dans son bunker pour éviter un déluge de bombes XD *)

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